Sur la musique de El Choclo, partition guitare de K. Duzgoren.
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A1
Le bandonéon s’abandonne et se pavane,
quand la guitare qui s’égare tient plus la barre ;
ses notes transpirent de peur et dégoulinent
sur le piano dont le tempo court au suicide ;
La contrebasse qui se ramasse et qui soupire
Sur le violon qui change de ton comme il respire
Et le saxo qui fait le beau s’attend au pire
Pour un tango détricoté en délire.
A 2
Il fut un temps où tous jouaient ensemble
Et de concert tissaient leurs arabesques ;
Pas un seul d’entre-eux se trouvait en reste
Pour caresser la mélodie avec ivresse ;
Ils traversaient tous les morceaux avec l’aisance
Et le jeu sûr d’un maestro plein d’assurance,
car la joie simple qu’il mettait à bien s’entendre
faisait envie à tous ceux qui voulait comprendre.
B1
Mais un jour vint où une flûte funeste
Se mit en tête d’y apporter sa peste
et de se joindre à eux pour mieux se permettre
de briller plus qu’il ne faut pour être honnête.
B2
Cet appendice à zizanie mit la tempête
Au cœur des autres instruments pris à son piège ;
elle se voulait la seule reine de la fête
en distillant le miel fielleux de ses arpèges .
C1
Et depuis il tourne de travers l’édifice
Dont les accords discordants se dévissent ;
c’est un pugilat général de fausses notes
que pousse le vent et qui s’exportent.
C2
Chacun veut mettre son tempo dans la lumière
et fait vibrer les trémolos de ses prières
qui s’élèvent vers le dieu de la musique
pour en être reconnu le seul enfant unique.
A3
Et c’est ainsi depuis longtemps que pour le bal
qu’il soit celui de son quartier ou des ambassades,
on se dispute, on se querelle, on se cabale,
pour cette flûte convoitée qui fout la pagaille.
Pourtant il reste quelques zestes d’harmonie
dans ce concert si détonnant que rien ne lasse,
grâce au tango que rien n’efface, qui tient sa place,
en attendant que tout ce chahut passe .
Jysseheffe